« Je suis née en Calédonie et je n’ai pas le droit de voter »

J.-F.G. | Crée le 16.10.2020 à 04h30 | Mis à jour le 17.10.2020 à 04h30

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Iman a 18 ans et n’a pour l’instant pas la possibilité d’intégrer le corps électoral des provinciales. Une « injustice » à ses yeux. Photo J.-F.G.

Portrait. La jeune chanteuse a décidé d’interpréter Mon cœur ma voix. Une chanson engagée qu’elle assume entièrement puisqu’elle fait partie de ces natifs non-citoyens qui ne s’imaginent pas vivre ailleurs.

Iman n’a pas encore 19 ans. Et généralement, son cœur bascule naturellement vers la musique plutôt que vers la politique. Mais ces derniers temps, difficile pour cette native calédonienne de faire autrement. Elle fait partie de ces jeunes qui, malgré leur droit de voter aux élections référendaires, n’ont toujours pas le droit de voter aux provinciales.

« Mes parents ne sont pas citoyens calédoniens, aussi, je me retrouve dans l’impossibilité de décider de la politique culturelle ou encore de la fiscalité. Tout ce qui concerne l’avenir au final… »

Elle a donc décidé de mêler passion et préoccupations en interprétant, Mon cœur, ma voix. Une chanson diffusée depuis maintenant trois semaines sur certaines radios calédoniennes. Et qui fait d’elle la « muse » de l’association Un cœur, une voix, exigeant le dégel du corps électoral provincial en 2024. « Je ne suis pas une chanteuse engagée en temps normal, mais là c’est un vrai sentiment d’injustice que je vis. Au moins, les gens entendent ce que j’ai à dire ». Iman le rappelle, elle ne connaît que la Calédonie, elle est née a grandi et fait ses études ici et ne souhaite pas vivre ailleurs. « Ce n’est que très récemment que j’ai été sensibilisée, par mes parents, à tout ce qu’il se passait. Et, comme l’association, je ne conteste pas le fait qu’il y a eu un gel transitoire électoral. Mais cela devait durer 20 ans… Ça va faire 26 ans ! ».

« Je ne comprends pas les abstentionnistes »

Forcément, elle sera de ceux qui se rassembleront, « pacifiquement » insiste-t-elle, demain matin devant le haut-commissariat, pour alerter le ministre des Outre-mer encore en quatorzaine. Car la jeune chanteuse avoue être un peu angoissée. « Je ne vois pas trop de place pour moi pour l’instant. Si la moindre initiative peut nous aider à pouvoir voter. » A présent, elle essaie de mobiliser des amis « même ceux qui votent déjà » pour qu’ils soient avec elle dans ce rassemblement. « Je pense sincèrement qu’eux aussi trouvent ça aberrant quand je leur raconte mon histoire, raconte Iman. Et j’espère qu’ils votent tous. Au référendum, je connais certaines personnes qui ne sont pas allées voter. Je ne comprends pas les abstentionnistes en général, notamment les jeunes, qui ont l’air de s’en ficher. Moi je suis née en Calédonie et je n’ai même pas cette possibilité. »

Un cœur une voix compte bien faire le plein demain matin, devant le haut-commissariat. L’association qui souhaite la réouverture du corps électoral évoque 41 358 électeurs exclus. « Il n’y a pas que le cas d’Iman et des jeunes, explique Raphaël Romano président de l’association. Il y a toutes les ethnies. Une grande partie est d’origine tahitienne et wallisienne mais il y a également des Calédoniens de souche, absents quelque temps, qui se retrouvent exclus du vote ».