Il était descendu à Nouméa « pour récupérer une voiture » volée par « les cousins ». Ce n’est qu’un détail. Mardi, le tribunal correctionnel s’est concentré sur la fin du périple, sur le moment où un homme de 18 ans, au casier judiciaire vierge, a ouvert le feu sur les gendarmes.

Sur le chemin du retour à Canala, les trois occupants de la voiture forcent un barrage de gendarmerie. Ils distancent les poursuivants et se « dispersent » dans Nakéty, explique le prévenu, qui, pour sa part, « va chercher le fusil » et revient au bord de la route avec trois cartouches. L’arme « à la hanche », il tire sur un véhicule qui s’approche à vive allure.

« Je voulais crever la roue », explique le jeune homme, qui dit ensuite avoir visé le moteur. « Je voulais juste faire peur ».

« Quand on veut faire peur, on tire en l’air. Pourquoi avez-vous pris le risque de tuer quelqu’un ? », objecte Éric Mangin, l’un des deux assesseurs. Une balle a traversé la portière, « frôlé » la cuisse du passager et s’est incrustée dans le siège du conducteur. Le tribunal suspecte une autre motivation. « Vous étiez en colère contre les gendarmes ? »

« plus de cartouches »

« Non », dit le prévenu, qui évoque toutefois sans grande joie les « fois où ils rentrent chez les gens, ils tournent devant la maison ». « Il faut bien qu’ils fassent leur travail ! Des voleurs de voiture, à Nakéty, il y en a plein, je parle sur dossier », explose la procureure, Céline Fortesa.

L’avocate des gendarmes, Me Lepape, regrette que le prévenu ne se soit pas rendu. « Il a fallu aller le chercher, après un mois de palabres, avec une intervention du GIGN ». Elle reste persuadée que le tireur « voulait faire sortir les gendarmes de leur voiture ». « Et s’il n’a pas tiré davantage, c’est parce qu’il n’avait plus de cartouches. »

L’avocate de la défense veut couper court « aux hypothèses ». Les faits, rien d’autre. Elle demande la clémence du tribunal face au « comportement gamin » d’un jeune homme « désœuvré, qui a perdu son père il y a une dizaine d’années ». Pour ce premier passage à la barre, elle suggère une condamnation avec sursis, « pour lui permettre de se reprendre en main dès maintenant, et de travailler ».

Son client joue une dernière carte risquée, celle de l’ignorance. « Je ne savais pas que c’était aussi grave », dit-il avant de « s’excuser auprès des gendarmes ». La procureure voulait cinq années de prison. La moitié ferme, la moitié avec sursis, dit le tribunal.